A en croire l’ONG internationale Global Witness, les sanctions européennes à propos du diamant zimbabwéen auraient été enfreintes à Anvers (Belgique). Zoom sur une polémique qui n’est pas près de s’éteindre.

C’est un secret de polichinelle : les dirigeants du Zimbabwe ont détourné pendant de longues et désastreuses années les profits tirés de l’exploitation du diamant pour financer la répression de leurs adversaires politiques malgré les sanctions de la communauté internationale. C’est du moins ce que vient appuyer lundi un rapport Global witness, une ONG qui œuvre pour la lutte contre la corruption.

En effet, cette organisation a rendu public un rapport dans lequel elle met à l’index les méthodes frauduleuses et dolosives des services secrets zimbabwéens qui ont détenu discrètement une partie du capital d’une entreprise qui extrait des diamants dans la mine de Marange (est).

«Des entreprises détenues par la très redoutée agence de renseignement, l’armée du Zimbabwe ou le gouvernement lui-même ont délibérément dissimulé leurs comptes et leurs opérations » assène le rapport. Une accusation digne de ce nom, certes, mais il y a de quoi attirer les foudres de l’ONG car des documents jusque-là tenus secrets par les autorités zimbabwéennes suggèrent que des pierres produites par cette entreprise, Kusena Diamonds, ont été vendues à Anvers et à Dubaï et ont servi à financer les services de sécurité du pays.

L’ONG cite le cas d’une autre entreprise détenue pour partie par l’armée qui a, elle aussi, vendu des diamants en violations de sanctions imposées par l’Union européenne (UE) en réplique à la répression de l’opposition.

Une supercherie pourrait en cacher une autre

Trois appels d’offres, réalisés entre décembre 2013 et septembre 2014 par l’Antwerp World Diamond Centre (AWDC), l’Antwerp Diamond Tender Facility (ATF) et la SPRL First Element, seraient la cause de la mise en vente des diamants zimbabwéens par l’entremise de l’entreprise chinoise Anjin. Ces pierres (très) précieuses qui proviennent de la célèbre mine de Marange furent exclues par le passé du marché international car considérés comme des « diamants de sang ».

En 2002, l’EU a introduit des sanctions à l’encontre de la république du Zimbabwe, en réponse à une escalade de la violence envers des personnes critiques du régime et de l’introduction d’une législation répressive. Six années plus tard, l’entreprise militaire Zimbabwe Defence Industries (ZDI) et l’entreprise Zimbabwe Mining Development Corporation (ZMDC) ont respectivement été ajoutées à la liste des sanctions de l’union européenne.

La levée des sanctions

La plupart de ces sanctions ont été levées en septembre 2013, après la tenue d’élections au Zimbabwe. Celles contre ZMDC ont ainsi été retirées à la suite d’un intense lobby belge en faveur de cette entreprise.

 

Côté belge et plus précisément anversois, l’AWDC souligne, dans une réaction à Global Witness, que toutes les sanctions de l’UE ont été strictement suivies et qu’il n’existe aucune preuve formelle de connexion entre Anjin et ZDI. Anjin, quant à elle, n’a pas voulu réagir aux accusations qui l’affligent.

Le Zimbabwe de la discorde

Depuis son indépendance en 1980, le Zimbabwe est dirigé d’une main de fer par le président Robert Mugabe. Le pays traverse, depuis une réforme agraire engagée au début des années 2000, une importante crise financière qui nourrit la colère de la population. Elle a causé l’an dernier une énième vague de contestation sévèrement réprimée. Le plus ahurissant, c’est que ce pays du globe n’a jamais publié de statistiques crédibles de ses activités diamantifères, qui ont réellement débuté en 2006.

En 2013, un rapport parlementaire avait fait mention de « sérieuses différences entre les bénéfices tirés par le gouvernement de ces activités et les revenus que les compagnies minières du secteur ont assuré avoir versé au Trésor ». En 2012, Global Witness avait affirmé que la CIO avait reçu 100 millions de dollars (83 millions d’euros) et une flotte de 200 véhicules de la part d’un homme d’affaires établi à Hong Kong en échange de diamants vendus hors des circuits officiels.